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Que signifie la fin d’une maison d’édition ?

Vous le savez peut-être déjà : la maison d’édition ActuSF a annoncé sa fermeture en ce mois de septembre. Pour certains et certaines, cela pourrait sembler anecdotique : « c’est juste une boîte qui met la clé sous la porte, comme des centaines d’autres en France ». Sauf que dans le domaine de la culture, ce n’est pas aussi simple.

La fin d’une époque

Quelle que soit l’entreprise qui ferme, c’est toujours la fin de quelque chose. Il deviendra impossible de retrouver ses produits, ses salariés perdent leur emploi… C’est donc rarement une bonne nouvelle.

Est-ce que je trouve plus grave de ne plus pouvoir acheter certains livres qu’un pull d’une marque connue ? Oui, j’avoue. C’est peut-être à cause de ma sensibilité littéraire. C’est peut-être parce que j’estime que cela représente une véritable perte pour la culture.

C’est parfois difficile à exprimer, mais il faut bien le dire : avec ActuSF qui doit déposer le bilan, ce sont des dizaines de titres et d’auteurices qui risquent de disparaître. Parmi elleux, des sagas en cours (Il faut ABSOLUMENT que la Geste de Morgan of Glencoe puisse se poursuivre quelque part), des romans qui ne seront presque certainement plus jamais réédités ailleurs (et je peux vous dire que leur catalogue contenait plus d’une pépite).

Parce qu’il faut bien le dire, dès maintenant : si vous n’aviez pas pu vous procurer certains romans dont vous aviez entendu parler… Il est peut-être déjà trop tard pour eux. Oui, leurs auteurs et autrices pourront poursuivre leur carrière ailleurs, c’est possible. Mais ces titres-là, dont certains sont déjà en rupture de stock, n’ont qu’une infime chance d’être repris ailleurs par un autre éditeur.

L’édition, ton univers impitoyable

C’est le moment de vous faire une petite leçon sur l’édition. Brève, rassurez-vous. Une maison d’édition, c’est avant tout une entreprise. Son but, c’est de gagner de l’argent. Pour produire des livres, soit, mais pas uniquement pour le plaisir. Il faut qu’ils rapportent.

C’est pour cela que les romans tournent à toute vitesse dans les librairies. Vous avez entendu parler d’un roman et vous attendez quelques mois pour l’acheter ? Oups, il n’est déjà plus dans les rayons. Dans le meilleur des cas, vous penserez à le commander. Mais, parfois, l’ouvrage est en rupture de stock, n’est plus édité… et vous vous retrouvez le bec dans l’eau (comme la personne qui a consacré des mois à l’écrire et qui n’a eu droit qu’à un petit tour sur les tables des libraires…. Si elle a de la chance).

Autant vous dire que dans ces circonstances, les chances pour qu’un éditeur décide de rééditer un ouvrage déjà paru ailleurs sont proches de zéro (cela n’arrive que pour les ouvrages considérés comme des classiques qui se vendront toujours. Comme la énième réédition de Tolkien ou de Harry Potter par exemple).

Que puis-je faire pour aider un auteur ou une autrice alors ?

Pour les ouvrages déjà parus chez ActuSF, vos actions ne sont pas aussi limitées qu’il n’y paraît. C’est le moment idéal pour aller fouiller les rayons de votre librairie préférée pour vérifier s’il y en a encore en stock, avant qu’ils ne disparaissent définitivement. Vous aurez ainsi le plaisir d’enrichir votre bibliothèque de beaux ouvrages (et qui sait s’ils ne vaudront pas très cher dans quelques années ? Oui, j’ai un petit côté bibliophile, j’avoue). Mais aussi, vous contribuerez à améliorer les chiffres de vente de ces livres (et donc, peut-être, leur opportunité d’être repéré par de futurs repreneurs).

Prenez ensuite quelques minutes pour commenter vos lectures (sur les sites de vente en ligne, sur les forums adéquats..). Pas la peine de rédiger un roman (c’est déjà fait d’ailleurs), juste quelques lignes, quelques mots. Histoire de faire savoir que oui, ce livre vaut le coup, et que d’autres ont tout intérêt à le comprendre aussi (bon, les menacer n’est peut-être pas obligatoire, par contre…)

Évidemment, je suis parfaitement consciente que tout le monde n’a pas le budget pour acheter tous les livres qui paraissent, même pour soutenir des auteurs et des autrices que vous aimez bien. Et la bonne nouvelle, c’est que vous pouvez agir quand même.

Que ce soit pour les auteurs et autrices d’ActuSF ou les autres, je vous encourage fortement à vous abonner à leurs réseaux sociaux, à liker, commenter ou partager ce qu’ils et elles publient. Parce que, oui, cela les aide aussi à se faire connaître. Et dans le monde impitoyable de l’édition, un auteur ou une autrice qui a déjà une communauté qui le ou la suit, c’est tout de suite plus intéressant.

Ne laissez pas tomber les auteurs et les autrices d’ActuSF ! Vous avez un véritable pouvoir entre vos mains, ne l’oubliez jamais.

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Mes rêves d’autrice

Quand j’étais enfant, je disais déjà à tout le monde qu’un jour je serais autrice. Bon, en vrai, je ne disais pas ça, parce qu’on n’utilisait pas (ou plus) le mot autrice à l’époque, mais j’affirmais en tout cas que j’écrirais des livres. Je le savais, c’était une évidence, et je ne comprenais pas vraiment pourquoi on souriait doucement en me disant « c’est bien, mais il faut avoir un autre métier ». Aujourd’hui, plusieurs de mes romans sont dans les mains (et les bibliothèques) des gens, donc je pourrais croire que j’ai atteint mon objectif. Mais si celui-ci avait grandi avec moi ?

mes rêves d'autrice

Être publié·e, le Graal ?

Quand j’étais petite fille, donc, ce que je voulais absolument, c’était voir mon livre en librairie (et chez les lecteurs et lectrices aussi, bien sûr). À l’époque (je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans, tout ça tout ça…), on ne parlait pas encore d’édition indépendante. Donc, les maisons d’édition avaient tout mon intérêt, et l’entièreté de celui-ci.

Depuis, j’ai eu des titres publiés dans des magazines, dans des maisons d’édition de diverses tailles, et en auto-édition. Chacune de ces expériences est aussi géniale que l’autre. Je ne vais pas vous mentir : autant j’aime avoir le contrôle de tout en auto-édition, autant les maisons d’édition traditionnelle ouvrent des portes totalement différentes. Et je suis absolument ravie de mon expérience avec les éditions Milan (au point de me demander si je continuerai à sortir des titres de mon côté).

Être publiée par une « grande » maison d’édition, c’est un rêve de petite fille qui se réalise. J’ai envie d’aller dire à la moi d’alors « tu as raison d’y croire. Persévère et un jour ça arrivera. Et tu seras tellement fière… ».

Car, oui, chaque étape rend fière : le premier retour positif sur un titre, la première dédicace, les premières personnes qui reviennent vous voir en vous disant « j’ai adoré votre dernier roman ». Je l’ai déjà dit, et je ne le répéterai jamais assez, mais c’est vraiment quelque chose qui me porte.

Et cette nouvelle étape, de savoir que mon livre est accessible dans toute la France, je la savoure comme il se doit. Sans renier les précédentes. Mais sans bouder mon plaisir non plus (et ça, croyez-moi, c’est important. Faites une pause pour savourer vos propres réussites, et on passe à la suite).

Et maintenant, tu fais quoi ?

Si mon rêve d’enfant, c’était d’avoir mon livre en librairie, c’est bon je peux m’arrêter maintenant, non ?

Je me gausse un peu, puis je vous réponds.

Déjà, vous pensiez sérieusement que j’allais m’arrêter là ? Vous croyiez que je n’avais pas d’autres histoires à raconter ? Alors ça, je peux vous assurer que ce n’est pas près d’arriver. Je peux déjà vous affirmer qu’il y aura d’autres livres, d’une manière ou d’une autre. Et ça, ça me fait déjà plaisir (à vous aussi, j’espère ?)

Je pourrais me satisfaire de cela : écrire des romans. Me débrouiller pour que des lecteurs les découvrent. Passer au suivant.

Mais, d’un, je ne suis pas un robot (si, si, j’ai vérifié. Avec des captchas mais pas seulement).

De deux, depuis mon enfance, j’ai découvert qu’il existait plein d’autres facettes à la vie d’auteur ou d’autrice. Et ces buts-là, je ne les ai pas encore atteints.

Il ne faudrait jamais renoncer à ses rêves d’enfant…

Par conséquent, j’ai fait une petite liste (non exhaustive. Il ne faut jamais mettre de fin à ses rêves). J’aimerais :

  • recevoir des fan-arts de mes romans (faites-vous plaisir si vous aimez dessiner et appropriez-vous mes personnages)
  • apprendre qu’il y a des fan fictions sur mes romans (certains n’aiment pas ça. Moi, j’adore l’idée)
  • être invitée à un salon littéraire (savoir que quelqu’un d’autre a eu envie de me faire venir, le rêve !)
  • recevoir un prix littéraire (j’ai déjà eu des prix pour des nouvelles, mais jamais pour mes romans. J’ai envie d’un peu plus de gloire dans ma vie. En plus, ça ressemble à des paillettes !)
  • voir une de mes œuvres adaptées. Au ciné ou en série, je ne suis pas difficile.
  • avoir mes romans traduits à l’étranger.

Puis il y a les trucs qui ne dépendent que de moi : sortir une version illustrée d’un de mes romans (ça, c’est un projet pour Le Secret du vent, maintenant que la trilogie est terminée), faire des scénarios de BD (ou de série TV aussi, on y revient), écrire un roman interactif…

Et puis il y a le but ultime : vivre uniquement de l’écriture de fiction.

Bref, comme vous le voyez, j’ai encore de quoi m’occuper pendant quelques années !

Et vous, c’est quoi vos rêves ?

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Pourquoi l’écriture inclusive fait-elle peur ? Et à qui ?

L’écriture inclusive fait débat. Depuis déjà un certain temps. Jusque là, je n’en parlais pas, je me contentais de m’informer sur le sujet (et d’apprendre de nombreuses choses intéressantes sur l’histoire de la langue française et la construction mentale qu’elle implique). Et puis, j’ai lu que des députés voulaient interdire l’écriture inclusive dans les documents officiels et dans les communications publiques. Interdire, carrément ? Et si on remettait un peu les choses au clair…

C’est quoi, l’écriture inclusive ?

Ce qui inquiète (en apparence) beaucoup de personnes sur l’écriture inclusive, c’est ce fameux point médian (qui rendrait les textes illisibles) et les tout aussi célèbres mots nouveaux (« celleux » est l’un des exemples fréquemment cités).

Avant de revenir sur ces points précis, il faut peut-être redire que l’écriture inclusive, ce n’est pas que cela. C’est une conception de la langue et de la grammaire française qui prend un peu de distance avec le contestable « le masculin l’emporte ».

Et cela se traduit par un ensemble de pratiques :

La double flexion

On l’a déjà très souvent entendue dans les discours politiques. La double flexion, c’est dire « Français, Françaises », « toutes et tous », « lecteurs et lectrices »… Bref, c’est une manière d’inclure tout le monde dans un texte (oral ou écrit).

Ce n’est pas très difficile à mettre en application. Au pire, cela peut allonger un peu ledit texte. Mais est-ce vraiment si grave et pire que d’invisibiliser toute une partie de la population ?

Le langage épicène

Là, cela devient un peu plus technique, puisqu’il s’agit d’éviter tout terme qui serait masculin ou féminin, pour n’utiliser que des mots neutres. Par exemple « les droits humains » plutôt que « les droits de l’homme » « élèves du lycée » plutôt que « lycéen ».

L’exercice demande un peu plus de réflexion sur le langage, d’autant qu’il existe finalement peu de termes réellement neutres dans notre lexique. Ce qui le rend parfois peu pratique à mettre en place.

Une réflexion sur la règle de proximité (ou de majorité)

Non, vraiment, le masculin est toujours plus fort ? Même quand il est tout seul au milieu d’un groupe de femmes ? Avouez que je ne suis pas la seule personne qui a parfois eu du mal à trouver la logique dans cette manière de réfléchir. On pourrait choisir d’accorder soit au plus grand nombre de personnes d’un même sexe présentes, soit au genre qui est le plus proche de l’adjectif à accorder (ça va, vous suivez toujours ?)

Dire « Max et les filles sont parties à la plage », en quoi serait-ce si choquant ? Sauf, peut-être, pour des hommes qui n’auraient pas envie d’être accordés au féminin…

La (re) féminisation des noms de métier

Là, il s’agit d’un travail qui se met en place et qui est encore en construction (il suffit de lire les débats qui reviennent fréquemment autour du terme « autrice » ou le récent tollé autour de certaines définitions de dictionnaire : une bouchère étant ainsi l’épouse du boucher ou une guerrière une « jeune femme qui revendique avec agressivité sa place dans la société ».

Accepter qu’une femme puisse exercer un métier, et être donc appelée par le nom de celui-ci, fait aussi partie de l’écriture inclusive.

femme qui écrit autrice

Le point médian

On en arrive enfin au fameux point médian. Tout d’abord, dans la pratique, il n’est rien de plus que l’équivalent actuel des parenthèses qui étaient auparavant utilisées dans un grand nombre de formulaires administratifs. Ce qui était « les étudiant(e)s » devient « les étudiant·e·s ». Un changement radical, n’est-ce pas ?

Pourtant, cette simple transformation de la langue (qui revient aussi à ne plus mettre entre parenthèses le féminin, mais on y reviendra plus tard) suscite de nombreuses levées de boucliers. Il est même argumenté que cela rendrait la lecture plus difficile.

Est-ce que c’est une idée nouvelle ?

Tout d’abord, l’écriture inclusive, ce n’est pas nouveau (et non, désolée, ce n’est pas un complot récent et une transformation radicale de notre héritage culturel).

De nombreux procédés de l’écriture inclusive, listés dans les points précédents, faisaient partie de notre langue auparavant :

  • La professeure de littérature française Eliane Viennot décrit comment, jusqu’au XVIIe siècle, la règle de la proximité primait. C’est François Malherbe qui décida d’imposer ce léger changement aux pratiques.
  • La question de la féminisation des noms de métier revient régulièrement sur le tapis depuis 1982. Or, dans le passé, les femmes soignantes furent appelées « médecines » jusqu’au XVIIe siècle et l’on trouve des traces d’huissières ou d’officières de la Légion d’honneur.

Il existe même des directives sur le sujet :

  • Au Québec, la rédaction épicène est recommandée par l’Office québécois de la langue française (OQLF) depuis 1981.
  • En Europe, depuis 1990, le comité des ministres du Conseil de l’Europe recommande de promouvoir l’utilisation d’un langage reflétant le principe de l’égalité de la femme et de l’homme.

À la limite, on pourrait reconnaître que l’appellation « écriture inclusive » est récente. Avant, on parlait d’écriture égalitaire, épicène, non sexiste, non discriminante. Le principe reste toujours le même : ne plus nier toute une partie de la population.

Le masculin est neutre par essence, non ?

C’est un argument qui est souvent avancé pour dire qu’il faut arrêter de se prendre la tête avec l’écriture inclusive. Dans notre langue, on utiliserait un masculin neutre et générique, pas du tout pour mettre de côté les femmes, qui se plaignent pour rien.

En plus d’oblitérer l’aspect psychologique et sociétal, tout comme l’impact de notre langue sur notre construction mentale, c’est aussi oublier que, historiquement, non, le masculin n’est pas neutre.

Notre bon vieux français vient du latin. Qui comprenait des déclinaisons masculines, féminines… et neutres. Ces dernières ressemblant aux masculines, la paresse a poussé le neutre vers la porte de sortie.

Et ce qui nous fait croire que le masculin l’emporte (du moins en grammaire), c’est cette décision, expliquée en 1647 par le grammairien Claude Favre de Vaugelas

« le genre masculin étant le plus noble, [il] doit prédominer toutes les fois que le masculin et le féminin se trouvent ensemble, mais l’oreille a de la peine à s’y accommoder, parce qu’elle n’a point accoutumé de l’ouïr dire de cette façon »

puis, en 1651, par le grammairien Scipion Dupleix :

« Parce que le genre masculin est le plus noble, il prévaut seul contre deux ou plusieurs féminins. ».

Plus si neutre, notre masculin, non ?

Ce que l’on voit aussi dans la remarque de Claude Favre de Vaugelas, c’est qu’il a fallu habituer l’oreille à ce changement (comme pour l’écriture inclusive actuelle, non ? Combien de fois j’ai entendu « autrice, c’est laid comme mot »).

C’est quand même un peu difficile à lire, non ?

On en vient là à l’argument de certains orthophonistes, dyslexiques ou autres. Un positionnement qui s’entend et se respecte.

Il est vrai que de lire « les agriculteurs·trices » dans un texte peut rendre la lecture plus complexe qu’un simple « les agriculteurs ». Surtout quand on a déjà des difficultés de lectures.

Néanmoins, il ne faut pas oublier que

  1. les parenthèses qui remplaçaient les points médians étaient déjà utilisés dans ce genre de cadre auparavant et cela n’a jamais soulevé de levée de boucliers
  2. notre esprit a l’habitude de lire « Mme » ou « Dr » et de le traduire automatiquement. Pourquoi en serait-il incapable dans le cas du point médian ?
  3. Des études auraient tendance à montrer que le point médian serait même plus facile à lire qu’un point bas (celui que vous utilisez à la fin des phrases) ou des parenthèses.
  4. L’écriture inclusive, ce n’est pas que le point médian. On peut très bien dire « les agriculteurs et les agricultrices » ou « les personnes qui travaillent dans l’agriculture ». En quoi serait-ce un problème ?

Par ailleurs, il existe également des associations de personnes dites « neuro-atypiques » qui remettent en cause cette éventuelle difficulté. Selon elles, il suffirait de recalibrer les logiciels de synthèse vocale (ce qui, certes, nécessite peut-être des compétences particulières en programmation, mais certaines pistes sont déjà envisagées).

Pourquoi faudrait-il adopter l’écriture inclusive ?

Maintenant, en principe, vous en savez un peu plus sur l’écriture inclusive. Mais vous vous posez peut-être encore une question : pourquoi est-ce que cela fait débat ? Ou, pour commencer par l’un des côtés du débat : pourquoi certaines personnes tiennent-elles tant à ce que l’écriture inclusive soit adoptée.

Il existe plusieurs raisons à cela.

D’un côté, la simple logique : non, personne ne pourra jamais prétendre qu’un homme vaut plus que deux ou trois femmes. Et donc, ce n’est pas cohérent d’accorder des adjectifs qualificatifs à celui-ci.

Cependant, vous avez bataillé pour apprendre un semblant de grammaire dans votre enfance, ce n’est pas pour tout chambouler maintenant. Cela fait des décennies que la langue fonctionne de cette manière, on pourrait juste continuer, non ?

Et bien peut-être pas.

Parce que la manière dont nous nous exprimons est aussi le reflet de la manière dont nous pensons (ou conditionne celle-ci, diraient certains linguistes). Quel que soit le sens dans lequel on le prend, faire croire à des générations entières de petites filles que

  1. le masculin l’emporte sur le féminin
  2. il y a des médecins (hommes) et des sages-femmes, des instituteurs et institutrices (hommes et femmes) mais des professeurs (hommes… et mieux considérés)

Cela conditionne la manière dont elles se voient et se positionnent dans le monde. S’il y a plus d’hommes que de femmes dans certaines professions, c’est aussi lié au fait que la langue française ne laisse pas l’occasion à ces dernières de se projeter dedans. Différentes études ont été effectuées sur ce sujet : ici, ici, ici ou ici, notamment).

Par ailleurs, vous vous rappelez de la parenthèse, qui précédait le point médian ? Pour certain·e·s, c’était encore une manière d’enfermer les femmes entre des parenthèses… donc d’être considérées comme moins importantes. Oui, cette vision peut être considérée comme un peu exagérée et vous a peut-être arraché un sourire. Mais il y a quand même quelque chose de gênant dans tout cela.

Mais pourquoi certains s’offusquent contre l’écriture inclusive alors ?

Dans les personnes qui montrent au créneau contre l’écriture inclusive, on retrouve souvent… des personnes qui ont peur du changement. Parmi elles, certains et certains sont très pressé·e·s de monter au créneau, voire de s’offusquer dès qu’une marque ose utiliser de l’écriture inclusive dans une publicité ou ses réseaux sociaux. Comme si ces personnes étaient attaquées personnellement.

Pour l’Académie française, à cause de l’écriture inclusive « la langue française se trouve désormais en péril mortel » (j’ai envie d’ajouter « rien que ça ? »). Et c’est d’ailleurs en France que cette forme d’écriture rencontre le plus de résistance (elle est plus communément admise au Québec ou même en Belgique).

Et quand des projets de loi sont déposés contre l’écriture inclusive (le 28 juillet 2020 par Marine Le Pen et d’autres député·e·s, majoritairement du RN) ou dernièrement par de plus nombreux député·e·s (dont beaucoup de la majorité) qui commencent leur texte en disant, en substance « je ne suis pas contre l’égalité homme femmes mais… » (ce qui allume chez moi autant de signaux d’alerte que « je ne suis pas raciste/pas homophobe/pas macho, mais… »), je reste dubitative. Qu’est-ce qui les inquiète tellement ? Parce que ce n’est pas contre le point médian qu’ils et elles s’insurgent (ce qui, à la limite, pourrait s’entendre), mais contre l’écriture inclusive dans son ensemble.

Par ailleurs, certaines personnes préfèrent s’inclure dans une humanité présentée sous un neutre (au masculin). Dans une tribune, des linguistes expliquaient longuement que

« En introduisant la spécification du sexe, on consacre une dissociation, ce qui est le contraire de l’inclusion. En prétendant annuler l’opposition de genre, on ne fait que la systématiser : l’écriture nouvelle aurait nécessairement un effet renforcé d’opposition des filles et des garçons. »

Personnellement, je ne vois pas en quoi dire « les hommes et les femmes » pourrait les monter les uns contre les autres… Sauf si on suppose que l’esprit de compétition est inné chez l’être humain. Ou que reconnaître que on est tous différents mais que l’on peut tous avancer ensemble est encore problématique pour beaucoup.

Voilà. Maintenant, en principe, vous en savez un peu plus sur l’écriture inclusive. Comme vous vous en doutez suite à cette lecture, j’ai peut-être un avis sur la question. Par contre, avez-vous remarqué que vous avez lu un (long) texte rédigé entièrement en écriture inclusive ? Est-ce que cela était difficile ?

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Pourquoi une campagne Ulule pour Super Alana 2 ?

Vous voulez tout savoir sur le projet autour de Super Alana, ce qu’il y a dans le tome 2, et pourquoi j’ai lancé une campagne Ulule ? C’est maintenant que je vous explique tout.

Qu’est-ce que Super Alana ?

Il y a un an, je sortais un album pour les jeunes lecteurs, entre 8 et 12 ans. Il s’appelait Super Alana et il racontait la rencontre entre Alana, une petite fille noire, et deux extraterrestres aux caractères très opposés.

Grâce à eux, Alana développait des super pouvoirs et apprenait ce que c’était d’être une super héroïne.

Je vous invite à relire toute la description du premier tome si vous voulez en savoir plus. Mais il y a déjà un point important qui se dessinait : je voulais apporter un peu de diversité dans la littérature jeunesse. C’est pourquoi Alana est noire, que l’un de ses meilleurs amis est hyperactif, et que leurs cultures se mélangent sans aucun souci.

Que va-t-il se passer dans Super Alana 2 ?

Tout d’abord, un point important : il est possible de lire Super Alana 2 sans avoir lu le premier. Un peu comme les tomes de la Cabane Magique ou du Club des cinq. Le principe est que chaque histoire soit indépendante.

Dans ce nouveau tome, Alana va rencontrer un chien bien étrange. Il semble posséder des aptitudes que la plupart des canidés n’ont pas. Et elle va se demander s’il ne s’agirait pas d’un extraterrestre sur le point de mener une invasion de la terre.

En faisant appel à ses super pouvoirs, Alana va mener son enquête, au milieu des refuges pour animaux abandonnés. L’occasion de soulever certains points de société pour les lecteurs, mais tout en restant dans le principe d’une aventure. Il y a du suspense, des rebondissements, et si on réfléchit, on y prend surtout du plaisir.

Pourquoi une campagne Ulule ?

Si j’ai décidé de mettre en place une campagne Ulule pour Super Alana, c’est parce que je voulais atteindre un nouveau niveau pour ce roman.

Cette campagne me permettra de financer plus d’illustrations à l’intérieur, donc de mieux payer mon illustratrice mais aussi d’avoir un ouvrage plus attrayant visuellement.

Par ailleurs, je pourrai aussi faire réaliser des versions des tomes 1 et 2 pour les dyslexiques, ce qui est un projet qui me tient à cœur depuis le premier tome.

Enfin, si j’atteins les paliers maximums, une partie des bénéfices pourra être reversée à des refuges pour animaux, on rentre donc là dans un projet qui soit aussi éthique.

Et comment ça se passe ?

Concrètement, j’ai volontairement choisi un premier palier assez bas : le livre verra le jour, c’est une certitude.

Ensuite, c’est sur le bouche-à-oreille que tout va fonctionner. Plus vous partagez ce projet, plus il a de chance d’aboutir avec toutes ses versions. Il suffit d’en parler autour de vous pour multiplier ses chances de réussir… et de réussir en beauté ! C’est tout le principe d’une campagne de financement participatif comme Ulule. Vous faites intégralement partie du projet. Vous êtes plus que des consommateurs, mais des consom’acteurs, qui vous impliquez sur les livres de demain.

Super Alana 2 a besoin de vous pour exister !

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Qu’est-ce qu’un jeune auteur ?

Parfois, sur des publications, pour des prix, ou dans la presse, je vois cette mention qui m’interpelle « pour les jeunes auteurs ». Oui, mais c’est quoi, un jeune auteur ? J’ai longuement réfléchi à cette question…

Si la jeunesse d’un auteur se détermine par son âge…

Existe-t-il une limite d’âge pour ne plus être un jeune auteur ? En regardant cet article des Echos, je me suis dit qu’un jeune auteur avait forcément moins de 40 ans. 

Par ailleurs, le Prix du jeune écrivain place la barre à 26 ans maximum (tu ne bénéficies plus du tarif jeune dans le train ? Tu n’es pas un jeune auteur !). Et l’association pour l’aide aux jeunes auteurs ne s’adresse qu’aux moins de 30 ans. 

Dans tous les cas, on pourrait croire que la catégorie « jeune auteur » concerne principalement l’âge de celui-ci… Ce n’est pas tout à fait aussi simple.

Si la jeunesse d’un auteur se détermine par son nombre de titres…

C’est maintenant que cela devient amusant ! Croyez-vous vraiment que Colum McCann, dans ses Lettres à un jeune auteur, ait estimé que son livre ne concernait pas les quarantenaires et plus ? 

Dans ce cas-là, on pourrait donc estimer qu’un jeune auteur est un auteur qui débute dans le métier… Mais quels sont les critères pour déterminer qu’il devient un ancien : le nombre de titres écrits, publiés, les tirages, les récompenses ? Personnellement, je me sens certes plus « jeune autrice » que des auteurs qui en sont à leur dixième roman, et cela même si, dans l’état civil, j’ai quelques années de plus qu’eux au compteur.

Faut-il donc atteindre, je ne sais pas, moi, 7 livres (et là, encore, juste écrits ou publiés ? En édition traditionnelle ou indépendante ?)… pour dire que l’on atteint l’âge de raison des auteurs ? 

Pourquoi alors s’adresser aux jeunes auteurs ?

Par conséquent, j’avoue que l’appellation « jeunes auteurs » me laisse perplexe… Je ne sais jamais si je suis comprise dedans ou pas. En règle générale, pour les concours, c’est assez simple à déterminer, la limite d’âge est précise. Mais pour le reste…

Encore une fois, pour moi, cette classification est peut-être surtout une manière de mettre les gens dans des cases. « ah oui, mais toi, tu es encore un jeune auteur, tu as tout à apprendre »

Ce n’est pas nécessairement négatif de la part de ceux qui prononcent ces mots (je connais la bienveillance de Lionel Davoust qui partage ses conseils aux jeunes auteurs), et c’est souvent fait dans une idée d’accompagnement. Mais quand on écrit ses premiers titres au-delà d’un certain âge, ce qui est le cas de nombreux auteurs, ce type d’interpellation peut sonner de manière maladroite. 

Finalement, les conseils, les astuces, les masterclass d’écriture (comme celle de Roxane Dambre)… tout cela s’adresse à tous les auteurs, quel que soit leur âge. Certains seront peut-être plus utiles pour ceux qui démarrent dans l’écriture que pour les habitués (quoique). Mais il est plutôt agréable de se dire qu’on a tous un peu de jeunesse en nous.

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Un auteur peut-il parler d’autres communautés que la sienne ?

Depuis quelque temps déjà, je vois passer bon nombre de messages de personnes noires ou queer s’offusquant que des auteurs (et cela vaut aussi pour les acteurs et réalisateurs, d’ailleurs) mettent en avant des personnages de ces communautés sans pour autant en faire partie. Ce sujet m’interroge, réellement, et j’avais envie d’en parler un peu plus longuement.

communautés
Photo by Audrey M Jacksonon Unsplash

Faut-il être noir pour parler des noirs ?

Comme bon nombre d’auteurs et d’autrices de fiction, je n’écris pas que sur des sujets que je maîtrise parfaitement ni uniquement sur des situations que j’ai déjà vécues (désolée, je n’ai jamais été une sorcière sur une île bretonne dans les années 70, pas plus que je n’ai vécu dans un monde sans électricité et dirigé par les bibliothécaires).

Parce qu’il faut bien se rappeler que c’est de cela qu’il s’agit : une histoire inventée avec des personnages qui le sont tout autant.

D’ailleurs, les auteurs de SFFF (science-fiction, fantasy, fantastique) seraient bien embêtés s’ils ne pouvaient pas parler à la place des extra-terrestres et des elfes.

J’avoue cependant que c’est là faire un peu preuve de mauvaise foi : les elfes, jusqu’à preuve du contraire, ne constituent pas une minorité existante de notre société, brimée et parfois conspuée. Donc, nous pouvons imaginer tout ce que nous voulons sur eux, ils ne seront jamais blessés par nos propos. Ce qui ne sera pas le cas de toutes les communautés.

Pourquoi cela pose-t-il problème ?

Il pourrait être très facile de dire : « c’est bien beau, tout ça, mais justement, c’est de la fiction, on parle de ce que l’on veut et puis c’est tout ».

Ce n’est cependant pas ce que ressentent certaines communautés. Qui ont l’impression que des artistes (parce que c’est aussi le cas pour les films) soit utilisent leurs particularités « parce que ça fait bien et que c’est à la mode », soit en parlent sans connaître réellement tout ce qu’eux ont traversé. Parfois, des maladresses sont commises, des erreurs sont transmises. Parce que ce ne peut être qu’une vision de l’extérieur.

Un autre souci est aussi que ces personnes ont souvent vécu du rejet. Et que laisser d’autres parler en leur nom (le #ownvoices exprime ce fait), c’est encore une nouvelle manière d’être mis à l’écart (les chiffres montrent qu’il y a moins d’auteurs noirs publiés que de blancs).

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Chiffres d’après une étude portant sur les éditeurs américains, (https://ccbc.education.wisc.edu/books/pcstats.asp)

Ce n’est pas de la faute des artistes, mais ces communautés ont ce sentiment que d’autres prennent leur place. Et qu’ils ne peuvent donc même pas parler eux-mêmes de ce qu’ils vivent (encore une histoire malsaine de suprématie, en résumé).

Ne faut-il laisser la parole qu’aux personnes issues de ces communautés ?

Nous allons maintenant creuser un peu plus ce sujet.

Est-ce qu’un artiste prend la place d’un autre ?

À mon petit niveau, il m’est facile de dire que je ne prends la place de personne. La véritable question est pourtant plus vaste : est-ce que, si aucun auteur blanc ne parlait de la vie de noirs, les auteurs de cette communauté auraient plus de chance de pouvoir faire éditer leur livre ?

Est-ce qu’on ne pourrait pas plus se dire que chacun a quelque chose à gagner du succès de l’autre ?

Est-ce que ceux qui vivent ces problèmes ne sont pas les mieux placés pour en parler ?

C’est certain. Une expérience vécue est toujours plus pertinente qu’une expérience imaginée. Mais le propre d’un auteur, c’est aussi de savoir transcender sa propre expérience : je n’ai jamais été homme, je n’ai jamais été tétraplégique, et pourtant je peux imaginer ce que c’est de le vivre.

Ce qui n’empêchera pas, peut-être, des maladresses, malgré tout le soin que je mettrai à me documenter. Mais est-ce que je ne jouerais pas plus le jeu des classes dominantes en me taisant sur ces sujets ?

Pourquoi mettre un personnage LGBT+ ou racisé dans un roman si cela n’apporte rien à l’histoire ?

J’ai récemment vu passer des critiques qui s’offusquaient de voir une petite fille blonde remplacée par une noire dans un livre pour enfants, alors que rien n’était changé à l’histoire. Ce n’était pourtant pas des critiques racistes. Au contraire. Il était plutôt question de récupération (le fameux « ils le font parce que ça donne une meilleure image d’eux ») et certains se demandaient si c’était vraiment indispensable.

Ou encore ce genre de tweet (qui est peut-être ironique, mais qui correspond à un sentiment que je vois souvent passer)

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J’avoue que ce genre de raisonnement me pose souci. Je pencherais plus du côté de l’avis de Jo Ann Von Haff, qui dit « mettez de la diversité dans vos romans ». Parce qu’il n’est pas normal de considérer automatiquement qu’un personnage est blanc ou hétérosexuel. De continuer à dire que c’est la norme et que les autres caractéristiques ne doivent être utilisées que pour faire avancer une cause.

Je pense, très sincèrement, que montrer un décor de fiction avec des personnages de tous genres, cela contribue tout autant à faire avancer le débat et les mentalités. Et oui, on peut être homosexuel et vivre une vie rocambolesque sans que la question de la sexualité ne soit un point central. C’est ça, ce qui devrait être la norme pour moi. Si on continue à procéder uniquement autrement (même si c’est important aussi pour l’éclairage que cela apporte), on continuera à penser qu’il y a un problème à être différent.

Comment faudrait-il alors agir pour respecter chacun ?

Je pense qu’il faut continuer à parler de ces sujets. De toutes les manières possibles. La preuve en est qu’il n’y a pas encore assez de personnages de couleurs, racisés ou queer dans les livres, quelle que soit la tranche d’âge à laquelle ils sont destinés. Il en faut plus, parce que cela fait partie de notre monde.

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Mais il faut le faire avec soin. Se documenter me semble un minimum. Parce que, oui, le personnage noir n’est pas uniquement destiné à être un personnage secondaire, il peut (et il doit) aussi être le héros et, forcément, ce qu’il aura vécu va influencer sa personnalité. Même si cela ne doit pas toujours être l’enjeu principal du roman.

On parle de plus en plus de sensitivity readers, des lecteurs qui vont alerter un auteur ou un éditeur quand les propos contenus dans le roman peuvent poser problème. Et c’est très bien aussi de pouvoir avoir ce regard supplémentaire (même si faire des généralités peut aussi être dangereux : il n’y a pas qu’une manière de vivre une expérience ou de la ressentir et, de même qu’il y a plusieurs bêta lecteurs, il faudrait plusieurs sensitivity readers sur un même ouvrage).

Il s’agit donc avant tout de ne pas rester enfermé dans sa tour d’ivoire, et d’aller à la rencontre de l’autre, pour qu’il puisse transmettre son vécu, sa sensibilité. Parce que, à mon sens, empêcher des auteurs blancs et hétéros de s’exprimer sur ces personnages, c’est aussi prendre le risque qu’ils disparaissent à nouveau du paysage éditorial. Chacun a son mot à dire, de même qu’un homme peut aussi parler de féminisme. Oui, il n’a pas vécu la même chose qu’une femme, mais il peut être conscient qu’il y a des problèmes et vouloir contribuer à faire évoluer les choses. Ce n’est pas de la récupération. C’est juste que faire évoluer les mentalités doit se faire main dans la main.

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Pourquoi l’auteur indépendant est avant tout un professionnel

L’auto-édition se professionnalise de plus en plus. C’est un fait. Et pourtant, on voit encore trop souvent passer des messages qui disent « oui, mais bon, en vrai les livres sont moins bien que s’ils étaient passés chez un éditeur, ça reste un truc d’amateurs, quoi ». Et là, vous savez ce que j’ai envie de répondre ?

Fake News.

Et je vais vous démontrer pourquoi.

auteur pro

Comment le monde professionnel change… pour les auteurs aussi

Il y a quelques années, pas très loin dans le temps, un homme politique disait « je veux que tous les Français puissent devenir leur propre patron ». Que l’on soit d’accord ou pas avec ses propos, il faut bien être conscient que le monde du travail évolue. D’un côté, l’ubérisation de certains corps de métier inquiète, de l’autre le télétravail ne cesse de progresser, de même que le nombre de freelances.

La société se réorganise, à plein d’échelles différentes. Aujourd’hui, il n’est plus indispensable d’avoir un patron pour pouvoir travailler, l’on peut proposer ses services, ses talents, ses compétences, de manière individuelle. Ce sera le cas des graphistes, des consultants, des secrétaires, des formateurs… Certes, cela implique une prise de risques plus grande. Et une manière de travailler qui est peut-être différente, plus consciente de certains enjeux. Mais c’est une possibilité vers laquelle de plus en plus de personnes se tournent.

Et c’est aussi le cas dans le milieu culturel, et donc dans celui du livre. Avant, un auteur avait besoin d’un éditeur pour pouvoir aller à la rencontre de ses lecteurs. Aujourd’hui, ce n’est plus nécessairement le cas. Ce qui inquiète bon nombre de professionnels du secteur. Des professionnels qui affirment parfois, haut et fort, qu’eux savent faire et pas les autres. Ce qui n’est pas (plus) vrai.

Où l’on prouve que les éditeurs ne sont pas toujours indispensables

Quels sont les services qu’apporte un éditeur à un auteur ou à une autrice ?

Il va l’aider à retravailler son texte, en lui apportant un regard extérieur, son expertise, ses conseils dépourvus d’émotions parasites pour aller toujours vers le meilleur du roman.

(De plus en plus d’auteurs indépendants font appel à des correcteurs et à des bêta lecteurs extérieurs pour les aider à prendre du recul sur leur roman. Pas leurs amis, leurs voisins ou leurs cousins. Non, des personnes qui n’ont aucune raison d’être tendres avec eux, qui sont avant tout des lecteurs, et qui ont donc des avis très tranchés sur la question. Des personnes, donc, qui pourraient très bien travailler dans l’édition elles aussi, parce qu’un éditeur est avant tout un lecteur, comme eux)

Il va trouver le meilleur moyen de mettre en valeur le texte, avec une mise en page intérieure de qualité et une superbe couverture.

(Aujourd’hui, les auteurs indépendants peuvent faire appel à des graphistes pour réaliser cette tâche. Selon le budget dont ils disposent, le travail sera plus ou moins poussé. Des spécialistes se concentrent maintenant sur les maquettes, pour le papier comme pour le numérique.)

Il va lui permettre de participer à des salons littéraires et à des dédicaces pour aller à la rencontre de ses lecteurs.

(Les auteurs peuvent très bien effectuer ces démarches eux-mêmes. Tous les libraires n’acceptent pas les auteurs indépendants, ni tous les salons. Mais ces derniers sont quand même de plus en plus présents, et les lecteurs commencent à le savoir, et à l’apprécier).

Il dispose d’un réseau de distribution et de diffusion qui lui permet d’être présent dans de nombreuses libraires.

(Ce qui est, certes, un peu plus difficile pour les auteurs indépendants. Sauf que… Combien de petites maisons d’édition ne sont en réalité pas présentes sur les tables des libraires, ou juste avec un titre caché dans un coin ? Aujourd’hui, de nombreux auteurs indépendants vendent mieux leurs titres tout seuls que certaines maisons d’édition. Ce qui n’enlève rien à leur travail et à leur ferveur pour défendre les livres.)

Il a un service de communication plus efficace.

(oui, enfin s’il décide de l’utiliser pour présenter réellement le titre. Combien de maisons d’édition investissent avant tout sur leurs auteurs phares et ne font pas d’efforts de promotion pour les autres ? Un auteur indépendant va devoir se défendre tout seul, mais au moins il sait qu’il ne sera jamais la cinquième roue du carrosse de quelqu’un d’autre).

Les auteurs indépendants sont autant des pros que les éditeurs alors ?

Surprise : oui. Peut-être pas tous au même niveau. Oui, il y a toujours des auto-édités qui auront des couvertures qui font mal aux yeux et des fautes d’orthographe tous les paragraphes, ainsi que des histoires bancales. Mais on a tous vu aussi des titres pitoyables chez certains grands éditeurs, donc ce critère de qualité n’est plus vraiment valable.

Surtout parce que de plus en plus d’auteurs indépendants se professionnalisent, font appel à des prestataires extérieurs pour les aspects de leur travail qu’ils maîtrisent moins. On est là face à une démarche professionnelle, comme tout indépendant qui se respecte. Et qui devrait, donc, être respecté par les autres aussi.

Il n’existe pas de label de bon goût qui permettrait de dire qu’un éditeur a plus raison que d’autres lecteurs. Surtout quand ils sont nombreux. Rappelez-vous : de un, c’est de l’art, donc c’est forcément subjectif. De l’autre, ce n’est pas toujours l’éditeur qui va lire le manuscrit d’un auteur et le refuser au départ. C’est peut-être un stagiaire qui est au comité de lecture pour l’été. Si le travail est fait, et bien fait, alors le roman d’un auteur indépendant a autant de valeur que celui d’un éditeur.

Pourrait-on tous se passer des éditeurs, alors ?

Tout le monde ne serait pas d’accord sur cette question. Mais je ne pense pas que tout le monde peut être auteur indépendant. De même que tout le monde ne peut pas être son propre patron. Certains auront besoin d’être plus encadrés, d’autres n’auront pas le budget, l’énergie ou juste l’envie d’endosser les multiples casquettes d’un indépendant.

Passer par un éditeur, c’est plus confortable. Et c’est agréable aussi d’être pris en main par quelqu’un qui va vous dire « contente-toi d’écrire, mon grand, je me charge du reste ».

Parfois, aussi, il y a la conscience qu’une autre personne saura mieux donner toutes ses chances et toute sa puissance à un titre qu’on n’est capable de le faire soi-même.

C’est pour cela aussi que j’alterne, personnellement, entre l’édition dite traditionnelle et l’édition indépendante. Parce que, si j’aime pouvoir tout décider et prendre en main les choses de mon côté, ça me fait aussi du bien, parfois, de souffler et de laisser les rênes à d’autres personnes. Car c’est épuisant (tout autant qu’exaltant) d’être indépendant.

Mais je n’estime pas pour autant que mes titres chez les éditeurs ont plus de valeur que ceux que je publie moi-même. C’est juste une autre manière de déléguer, de faire confiance. Une relation professionnelle différente.

Et c’est bien cela qu’il faut se dire : un auteur n’est pas juste un artiste déconnecté du monde réel. De plus en plus, c’est également un professionnel. Indépendant ou non, mais un professionnel.

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De retour de Livre Paris

Et voilà, c’est fait, je peux le dire : j’ai participé, en tant qu’autrice, à Livre Paris. Ce salon présente une envergure certaine (une chatte n’y retrouverait pas ses petits… et d’ailleurs, ce n’était pas toujours évident de voir tout le monde) mais je suis très heureuse d’y avoir participé. Tellement que j’ai oublié de prendre des photos ! Ce qui ne m’empêchera pas de vous en raconter un peu les coulisses.

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Chapitre 1 : l’annonce

Tout commence il y a quelques mois, quand mon éditeur m’annonce qu’il aura un stand sur ce salon. J’avais renoncé à y participer en tant qu’indépendante, par rapport aux frais que cela engendrerait (car il faut que vous le sachiez, les stands ne sont pas toujours gratuits sur les salons. Une des raisons pour laquelle je ne serai pas non plus, à mon grand regret, aux Imaginales cette année).

L’éditeur me demandait si je voulais profiter de l’occasion pour participer. Autant vous dire que j’ai répondu « oui » très vite (moi, enthousiaste ? Mais non, ça ne m’arrive jamais voyons).

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Chapitre 2 : la préparation

Ma présence était donc confirmée sur le salon. Il me fallait donc en informer les gens qui me suivaient déjà, et qui pourraient être présents sur place.

J’ai donc commencé à dire sur les réseaux sociaux : coucou, je serai là.

J’ai très bien fait, puisque… (ah non, ça se sera pour un chapitre suivant!). Cela dit, certains n’avaient quand même pas vu passer l’info et m’ont dit, après le salon « ah bon, mais tu étais là ? ». Comme quoi, on ne peut jamais assez communiquer !

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Ensuite, j’ai fait imprimer des marque-pages spécialement pour l’occasion. Il était temps : De Biblioteca n’avait pas encore de marque-pages à son effigie ! Il se sentait seul, le pauvre…

Chapitre 3 : le départ

Les jours qui précèdent le salon, l’effervescence monte. À tel point que j’ai fini par faire une liste des choses à emmener avec moi pour ne rien oublier ! (et pourtant, vu tous les salons que j’ai faits dernièrement, je n’aurais plus besoin de liste en principe. Mon sac est toujours prêt, avec des stylos et des marque-pages, l’essentiel quoi!)

J’achète des réserves de chips et de M&M’s pour me préparer à affronter les trajets et les longues heures sur le stand.

Je change d’hébergement à la dernière minute parce que la personne qui devait m’accueillir était tombée malade (et là, je dois quand même dire qu’il faut remercier les gens qui m’entourent. J’ai toujours du mal à demander des services, mais je sais qu’il y a des gens autour de moi, même loin, qui me dépanneront si j’en ai besoin. Et ça, croyez-moi, c’est précieux).

Mon éditeur m’informe ensuite qu’il n’a presque plus de stock de mon livre (on est en train de parler réimpression, là!), et me demande de venir avec un peu de ce que j’ai chez moi. Vous m’imaginez, dans le train et le métro, avec ma valise, mon sac spécial dédicaces, et un autre sac de livres ? Et bien je l’ai fait !

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Chapitre 4 : Le salon

Je me suis donc levée à l’aube vendredi matin pour être sur le pont pour les premières dédicaces de la journée. Les portes du salon ne s’ouvrent pas avant 10 heures… même pour les auteurs !

Je me rue donc dans les allées pour arriver à l’heure, salue quelques têtes au passage (y compris quelqu’un qui m’a reconnu dans la file d’attente à l’entrée, une autrice qui passait me voir pour débuter sa journée…). L’ambiance était déjà donnée : sur place, on va se retrouver avec du monde qu’on aime.

Mon stand était au bout du mondedu salon. L’avantage, c’est que cela m’a permis d’avoir de longues discussions avec ceux et celles qui sont venus me voir. Car certains et certaines m’avaient notée sur leur liste de gens à voir, ayant bien noté que je serais présente !!! On a parlé de tout : d’éducation, de sport, de livre… C’était trop, trop bien.

Quand je n’étais pas en dédicace, j’allais voir les copains et copines (et j’ai encore acheté quelques livres, mais j’ai été raisonnable). Parfois, on reconnaissait quelqu’un qu’on suivait déjà sur les réseaux sociaux « cette tête me dit quelque chose » et on échangeait quelques phrases avant de se laisser emporter par la marée de la foule, et ne plus se revoir. Parfois, on voyait une tête apparaître au loin, en se disant qu’il fallait aller la saluer, puis elle disparaissait dans la marée humaine. Parfois, certains stands semblaient disparaître, avalés par un triangle des Bermudes spécifique à Livre Paris.

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Et j’ai pu expérimenter quelques techniques de survie pour ce type d’événements.

Chapitre 5 : les techniques de survie

Non, parce qu’il ne faut pas rigoler, je suis sûre qu’il y a des morts à chaque salon, écrasés par le poids des livres achetés par exemple ! Ou prêts à faire dédicacer leurs livres avec leur sang après avoir fait le pied de grue pendant plus d’une heure dans une file d’attente.

De mon côté j’ai :

  • trouvé des toilettes plus discrètes que les autres (ou je n’ai jamais du patienter pour avoir une place) ;
  • évité la queue au stand de nourriture en venant avec mes sandwichs le matin ;
  • superbement ignoré les stars qui rameutaient les foules pour aller faire signer des livres par des auteurs qui avaient du temps pour discuter (c’est plus sympa) ;
  • mis des bonnes chaussures parce qu’on marche beaucoup au salon ;
  • réparti mes achats sur plusieurs jours pour ne pas entièrement me déboîter l’épaule ;
  • pris des raccourcis par des endroits vides quand je devais rejoindre mon stand (un entrepôt froid et isolé, caché derrière des rideaux blancs…) ;
  • choisi d’arriver tôt le matin, et de rester tard le soir, quand la foule s’est dispersée.

Il fallait au moins tout ça pour survivre !

Chapitre 6 : le bilan

C’est le moment où on se dit : alors, ce salon, bien ou pas ? C’est une discussion qu’on a beaucoup entre auteurs.

Livre Paris, c’est une grosse machinerie. Il m’a permis de rencontrer des gens qui ne font presque que ce salon-là sur l’année. Donc, ça, c’est positif. Par contre, humainement, je crois que je préfère les salons de taille plus restreinte, à l’ambiance plus humaine. C’est tout bête, mais sentir qu’on existe pour les organisateurs, cela compte aussi énormément (et cela crée aussi une autre ambiance pour le public, plus chaleureuse).

Ce salon était une expérience. Et je le referais sans doute si on me le propose. Mais, je l’avoue, d’autres salons gardent encore la première place dans mon cœur (enfin, les premières places, même).

Néanmoins, je suis ravie de tous les échanges que j’ai pu avoir sur ce salon, des têtes venues d’ailleurs que j’y ai retrouvées, des rencontres qui ne peuvent avoir lieu que là.

Et vous, c’est quoi votre salon préféré ?
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Mes objectifs 2019

Beaucoup de gens prennent des résolutions en début d’année. Moi, je préfère me fixer des buts. Ou des objectifs. Voici donc (tadam!) la liste des choses que je veux faire en 2019 (et on se retrouvera dans quelques mois pour faire le point).

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Côté écriture

Alors là, il y a du pain sur la planche les amis.

  • Terminer Le Secret du vent 2 : il est bien avancé, je travaille dessus presque tous les jours. Je n’ai pas écrit autant que je voulais sur ce titre pendant le nanowrimo, mais j’en suis au moins à la moitié, si pas aux deux-tiers, du premier jet. Je compte bien le sortir cette année, au mieux pour les Imaginales, au plus tard pour les Aventuriales (ce qui me laisse l’été en plus comme date de sortie, c’est pas beau, ça).
  • Terminer mon roman pour plus jeunes lecteurs : ma fille me le réclame, ça fait des mois que je progresse comme une tortue dessus. Je dois le terminer avant qu’elle ne soit trop grande pour avoir envie de le lire. Ce qui va le plus m’ennuyer pour ce texte, c’est que je l’ai travaillé sur des carnets, à la main, et que je dois tout retaper !
  • Retravailler Complètement mordu : celui-là devrait aussi sortir en auto-édition, la trame existe, une grosse partie du texte aussi. Il faut reprendre une bonne partie, transformer certaines choses. J’aimerais bien vous le proposer pour décembre 2019 (en indé, donc, la seule maison d’édition à laquelle je pensais pour l’envoyer venant de fermer ses soumissions. Ce qui me donne une bonne raison pour le garder pour moi, na!).
  • En option, si j’ai du temps (ah, la bonne blague) : continuer mon guide d’écriture. Il est bien entamé, mais il y a encore beaucoup de travail à faire dessus, et ce n’est pas une priorité pour moi (je suis sûre que vous préférez lire mes histoires, en plus, non?)

Côté communauté

Comme je le disais dans mon bilan 2018, vous êtes de plus en plus nombreux à me suivre, et ça c’est chouette (merci et plein de bisous pour vous).

Mais ce pourrait être encore mieux. Soyons honnête : si je veux un jour pouvoir vivre de l’écriture, et avoir encore plus de temps pour vous proposer des textes régulièrement, il faut que vous soyez encore plus nombreux à me connaître. Partagez l’amour, les gars !

Donc je voudrais avoir plus d’inscrits à ma newsletteret plus d’abonnés qui me suivent sur les réseaux sociaux.

Et, pour vous remercier, je vous proposerai :

Ce qui va se passer

Par conséquent, en 2019, vous aurez encore de nouvelles occasions pour me lire.

J’ai aussi l’intention de continuer à participer à de nombreux salons du livre et dédicaces, parce que c’est ainsi que j’ai rencontré nombre d’entre vous ! N’hésitez pas à me dire quand vous me lisez déjà sur internet, ça me fait plaisir.

Je vais continuer à me consacrer plus à l’écriture sur les romans que sur les nouvelles des appels à texte. J’en ai fait un peu en 2018 mais je n’arrive pas à m’y investir autant que sur mes histoires longues. Il faut choisir ses priorités.

J’aimerais aussi proposer plus d’ateliers d’écriture, voire de conférences (il y en a déjà une qui se prépare pour le Salon Fantastique en novembre 2019!). J’aime bien avoir l’occasion d’échanger avec vous, et avec d’autres auteurs, sur l’écriture et le livre.

Et vous, quels sont vos objectifs pour cette année ?