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Qu’est-ce que la vraie littérature ?

Après avoir rencontré sur un certain nombre de salons du livre des personnes qui toisaient des romans en disant « non, je ne lis pas ça, moi, je dis des VRAIS livres », je me suis demandé, à juste titre, ce qu’était la vraie littérature. Essayons de faire un point là-dessus.

qu'est-ce que la vraie littérature

Ce qui, a priori, n’est pas de la littérature

Si l’on se fie au jugement a priori de ces lecteurs, on peut d’ores et déjà éliminer de la littérature :

  • la science-fiction, le fantastique et la fantasy (SFFF) ;
  • les romances ;
  • le policier ;
  • le jeunesse et le young adult.

Ce qui, avouons-le, représente un certain nombre de romans. Mais cela permet un tri rapide : la vraie littérature, c’est la littérature dite « blanche ».

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Qu’est-ce qui caractérise la littérature blanche ?

En gros, la littérature blanche, ce serait… tout ce qui n’est pas listé plus haut. Et, pour certains, ce serait considéré comme mieux écrit. Oui, on ne se contente pas de raconter une histoire, nous messieurs dames, on a du style.

Soit.

J’avoue que le style, c’est important. J’achète certains livres juste parce que je connais le style de leurs auteurs et que je sais que leur style va me plaire. Des livres où l’on sait par avance que ce sera bien écrit, qu’il y aura des métaphores incroyables, du texte qui nous fait mettre la tête dans un sac en se disant qu’on n’écrira jamais aussi bien.

Maintenant, soyons aussi honnêtes : dans la littérature blanche, il y a aussi des ouvrages qui sont beaucoup plus loin de remporter mon adhésion. Du triturage de cervelle qui donne mal à la tête, des envolées lyriques qui tombent à plat, et même des phrases tellement plates qu’on peut en superposer plusieurs et toujours les passer sous la porte.

Mais, aux yeux de certains lecteurs (et critiques littéraires), cela reste de la vraie littérature, parce que c’est de la littérature blanche. Que reprochent-ils donc aux autres livres : de raconter des histoires ou de manquer de style ? Creusons un peu le sujet.

Y a-t-il du style dans la littérature de genre ?

Si la vraie littérature est considérée comme mieux écrite, cela veut-il dire que les romans de SFFF, les romances ou le jeunesse ne font aucun effort de style ?

(Permettez, je me gausse un instant et je reviens…)

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Qui a déjà lu, et apprécie, ces livres sait que c’est loin d’être le cas. Même un album pour les petits peut être d’une poésie incroyable, Pef jongle avec les mots dans le Prince de Motordu, et je ne compte plus les romans qui m’ont fait vibrer tellement ils étaient bien écrits. Les titres de Chloé Bertrandtransmettent une émotion à fleur de peau, ceux deBenjamin Alire Sáenz aussi, j’ai vu des constructions de phrase incroyables, une inventivité folle comme dans La Horde du Contrevent de Damasio ou La Maison des feuillesde Mark Z. Danielewski, d’autres auteurs qui ont des vrais tons, qui savent jouer avec les images comme avec les sons…

Bref, il y a bien du style dans la littérature dite « de genre » (celle qui n’est pas vraie). Alors, c’est le type d’histoires racontées qui ne plairait pas… Voyons ça de plus près.

Et si la fausse littérature racontait de fausses histoires, contrairement à la vraie ?

Pour les non-amateurs du genre, la science-fiction ce sont des combats de vaisseaux spatiaux, la fantasy c’est des dragons et tout ça, de toute manière, c’est pour les enfants.

On pourrait donc, éventuellement, comprendre qu’ils ne considèrent pas cela comme de la vraie littérature, qui est plus intellectuelle, plus réfléchie, qui parle des vraies choses de la vie… Sauf que, à y regarder de plus près, de nombreux ouvrages de SFFF ou d’anticipation, se cachent sous des bandeaux de littérature blanche. Audrey Pleynet en a cité quelques-uns dans cet article, cette liste sur Babeliovous en présente d’autres.

Il semblerait donc que l’on puisse faire de la littérature blanche, donc vraie, et de l’imaginaire en même temps. Où va donc le monde ?

On nous aurait menti ?

Mais alors, c’est quoi, la vraie littérature ?

Tout récemment, je lisais une critique de film de science-fiction qui se terminait par ces mots « ce film prouve le potentiel romanesque de la science-fiction ». Pour rappel la définition de romanesque

romanesque :qui utilise les recettes du roman le plus traditionnel et fait appel à l’imagination, au rêve, au sentiment.

Ce qui laisserait encore entendre qu’il subsiste un doute sur le fait que la science-fiction puisse faire de bons romans. Ce pourrait être ça, la vraie littérature, les bons romans, tout simplement. Sauf qu’un bon roman pour l’un ne l’est pas forcément pour l’autre.

Et d’ailleurs, puisque nous en sommes aux définitions :

littérature :Usage esthétique du langage écrit. Ensemble des productions intellectuelles qui se lisent, qui s’écoutent.

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Donc, en fait, tout livre est de la littérature, de la vraie littérature, dès lors que quelqu’un le lit ou l’écoute, et y trouve quelque chose de joli. Alors, oui, ce qui vous plaît n’est peut-être pas ce qui me plaît. Mais s’appuyer sur une vue de l’esprit (erronée, qui plus est) qui affirme que certains romans sont de la vraie littérature et d’autres non, ce n’est pas joli-joli… Et cela, ce n’est pas la preuve d’un bel esprit.

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